12ème CHAPITRE - lundi 12h
Zind-Humbrecht, un grand d’Alsace




Les vins sont commentés par Gianni Fabrizzio et Léonard Humbrecht. Cet atelier a commencé par un long exposé de Léonard Humbrecht, dont voici un résumé.

Le domaine Zind-Humbrecht a été fondé par Léonard en 1959, année à partir de laquelle il a pu acheter un certain nombre de vignobles alors à l’abandon parce que trop pentus (son père ne possédait que 2 ha). A cette époque, on demandait de produire du volume et pas de la qualité. Pourtant les coteaux en question étaient ceux qui avaient fait la réputation de l’Alsace au XVème et XVIème siècles (ces coteaux ont d’ailleurs été classés en GC). Il a acheté ces coteaux en fonction des cépages qu’il voulait planter : granit + volcanique pour le riesling car ces sous-sols apportent la puissance et la finesse, calcaire qui amène le corps et la douceur pour le gewurz et le pinot gris. Visiblement il est opposé au complantage, estimant qu’à un type de terroir donné, il n’y a qu’un seul cépage qui soit bien adapté. Actuellement son domaine s’étend sur 40 ha répartis en 6 ou 7 terroirs différents, et c’est son fils Olivier qui en est à la tête depuis 1990 et qui l’a converti à la bio-dynamie. Ses vignes sont enherbées; il n’utilise pas d’engin lourd pour ne pas tasser le sol; 30 personnes travaillent dans les vignes. La densité de plantation est de 9000 à 10000 pieds par ha, et les rendements de 30 à 40 hl/ha. Les vendanges sont manuelles, les raisins sont amenés entiers au pressoir et le pressurage est long : 12 à 15h, ce qui permet de n’obtenir que très peu de bourbes : 1% au lieu de 15 à 20%. Les vins ne sont plus chaptalisés depuis 88. Il considère les oenologues comme des médecins, c’est à dire qu’il essaye de s’en passer, ceux-ci n’intervenant qu’en cas de besoin. Leur vignoble étant très bien exposé et les vendanges très mûres (supérieure à 13 - 14%), ils n’ont pas de problème d’excès d’acidité malique, à tel point qu’ils se " foutent " de contrôler la fermentation malo-lactique : " si elle se fait, tant pis. "
Mais place à la dégustation (enfin! je commençais à avoir soif).


1- Riesling Rangen de Thann GC - Clos Saint Urbain 96 - 13%
Robe jaune dorée (vieil or pour Léonard). Nez de truffe et d’agrumes. En bouche une acidité forte, et encore la truffe. Pas de sucre résiduel apparent bien qu’il y en ait sans doute un peu, " le sucre résiduel permettant un long vieillissement, sinon le vin sèche un peu " dixit Léonard.

2- Riesling Rangen de Thann GC - Clos Saint Urbain 00 - 14,3% + 19g de sucre résiduel.
Même robe que le précédent. Nez avec une note de fruits exotiques, presque de gewurz, ainsi que le miel et le caramel. Bouche moins acide que le 96, avec plus de rondeur, de gras et du miel.

3- Riesling Brand GC 00 - 14%
Même robe que les précédents. Nez avec aussi une note de fruits exotiques, mais qui a disparu progressivement. Bouche avec un peu de CO2 résiduel, puis du gras et beaucoup de douceur. S’est ouvert au bout d’une heure pour devenir somptueux : d’une très grande pureté et d’un équilibre parfait. Mon préféré.
Léonard précise que la fermentation a duré 1 an en foudre de bois et sur lies fines, avec uniquement des levures indigènes. Mais pour procéder à une telle fermentation il faut une récolte à 14 ou 15% au moins et une cave à température constante et très basse. Ses rieslings ne pétrolent pas, car pour lui, le pétrole est une conséquence de sols argilo-calcaires lourds qui ne respirent pas.

4- Pinot Gris 00 Clos Windsbuhl - 14,5% + 11g de sr.
Le clos Windsbuhl a un sol calcaire avec de la magnésie et de la dolomie.
Il s’agit pour cette bouteille du reste de la vendange après SGN et il n’y a donc pas de pourriture noble.
La fermentation a duré 1 an, puis le vin a été élevé 1 an et demi en fûts.
La robe est un peu plus claire. Le nez me plaît moins, sur les fruits trop mûrs, un poil écoeurant. Par contre la bouche est magnifique, équilibrée, avec du gras, une grande souplesse, pure. Le fûts est parfaitement fondu.

5- Gewurztraminer Heimbourg 00 - 16,5%
Nez typé gewurz et floral. En bouche, une pointe de CO2, puis du litchi, mais équilibrée. Peu de commentaire, car je n’aime pas les arômes variétaux du gewurz...

6- Gewurztraminer Hengst GC 00 - 16% + 18g de sr.
Le Hengst est un coteau calcaire connu depuis le IXème siècle. Le raisin y titre chaque année 16 ou 17% sans pourriture noble.
La robe est un peu plus foncée que le Heimbourg. Nez plus épicé. La bouche est moins typée gewurz, plus minérale, plus sauvage.

7- Gewurztraminer Rangen de Thann GC - clos Saint Urbain SGN 86 - 200g de sr.
Il s’agit du 1er vin de ce style du domaine. Il s’agissait d’une vendange à 23% potentiel, 100% botrytis (pas de tri). Cela arrive en moyenne tous les 3 ans. En 95, la vendange a même été récoltée à 36% potentiel et la fermentation s’est arrêtée à 6% d’alcool, le vin n’a donc pas droit à l’AOC...
Robe dorée magnifique. Au nez on perçoit une pointe de truffe, mais pas les arômes variétaux du gewurz. La bouche douce présente une grande complexité, avec une note douce pétrolée ou plutôt lard fumé. Une finesse magnifique.

En conclusion, c’était la première fois que je goûtais les vins de Zind-Humbrecht. Et j’ai été conquis par leur pureté et leur richesse. Des vins vraiment magnifiques.