10ème CHAPITRE - dimanche 18h
Bernard Dugat-Py, l’artisan du Chambertin



Vins commentés par Gianni Fabrizzio, en présence de Bernard Dugat et de sa femme. Tant mieux pour vous (ou tant pis, c’est selon), il a parlé en français, alors j’ai tout compris... (ça va être long...)
Bernard Dugat exploite un vignoble de 7,5 ha, presqu’entièrement sur Gevrey. Il est venu avec quelques uns de ses 2000, les 99 lui semblant actuellement plus difficiles à goûter.
Nous allons déguster 6 vins, 2 par 2 : 2 villages, 2 1ers crus et 2 grands crus, les 2 vins étant à chaque fois issus de terroirs très différents.

1- Gevrey villages Les Évocelles 00 et Coeur de Roy 00.
Les Évocelles sont situées sur la commune de Brochon, à la limite nord ouest de Gevrey, dans le prolongement des Champeaux, à une altitude comprise entre 320 et 380m. Bernard Dugat nous explique qu’il en exploite quelques dizaines d’ares depuis 95, et qu’il s’agit d’une vigne de 70 ans. Les rendements ont atteint seulement 18/19 hl/ha cette année (et encore, il est satisfait, il avait obtenu moins de 10 hl/ha en 95, 96 et 97, la vigne étant très mal tenue précédemment), ce qui a donné 1500 bouteilles. Le vin titre 13% non chaptalisé. La vinification est effectuée en cuve bois. Il effectue peu de remontage ou de pigeage, juste un contrôle des températures. L’élevage s’effectue en bois neuf pendant 18 à 19 mois, avec 2 ou 3 soutirages. Il s’agit là d’un vin de coteau qui exprime en général un surcroît de finesse.
Coeur de Roy est en fait un assemblage de plusieurs climats, principalement la Combe du Dessus. Il s’agit d’un climat situé dans le village de Gevrey, donc une parcelle de plaine (altitude autour de 280m). Le vin manifeste en général un peu plus de dureté jeune, mais est d’une très grande garde. La vigne est là aussi très vieille : les ceps ont entre 50 et 92 ans, avec une moyenne de 70/75 ans. Il en a produit 7500 bouteilles cette année.
Mais place à la dégustation... :-)))
Le Coeur de Roy est servi en carafe. Les deux vins présentent une même robe sombre, brillante et limpide. Un grand air de famille, à savoir un fruit magnifique, mais surtout une texture d’une très grande finesse malgré une concentration sensible. Effectivement les Évocelles présentent une plus grande finesse, un côté presqu’aérien, alors que Coeur de Roy est plus puissant, un poil plus austère, se livrant moins immédiatement.
Vraiment ça commence très très fort!

2- Gevrey 1er crus Lavaux Saint-Jacques 00 et Petite Chapelle 00.
Le Lavaux Saint-Jacques est situé dans la combe de Lavaut, à une altitude comprise entre 290 et 320m. C’est un vignoble de bas de coteau. Dugat en possède une petite parcelle âgée de 28/30 ans. Il en a produit 620 bouteilles en 2000.
La Petite Chapelle est située au sud de Gevrey, juste en dessous du grand cru Chapelle-Chambertin. Donc plutôt un vignoble de plaine. Dugat en a produit 1300 bouteilles cette année.
Les deux vins sont extraordinaires, ils présentent encore plus de finesse et de douceur que les villages. Les tanins glissent sur les gencives sans aucune agression (des anti-Barolo...) Et le boisé ne se sent absolument pas et pourtant ils sont élevés 100% en bois neuf, des chênes de la forêt du Tronçais.
Exactement ce qui me fait adorer les grands bourgognes, ce mélange de la finesse et de la concentration.

3- Gevrey Grand Cru Charmes-Chambertin 00 et Mazy-Chambertin 00.
Le Charmes est en fait issu de 2/3 de Mazoyères et 1/3 de Charmes (ou le contraire... ou autre chose... le camarade Bernard doit être un peu fâché avec les mathématiques car il a précisé 20 ares de Mazoyères et 30 ares de Charmes...) Il en a produit 1800 bouteilles cette année.
Dugat possède aussi depuis peu 6 ares (!) de Chambertin pour l’élevage duquel il se fait fabriquer chaque année un fûts sur mesure en fonction de son volume de vendange.
Les deux vins sont servis en carafes.
Le Charmes présente une pointe animale au nez, qui a disparu par la suite. La bouche est somptueuse de finesse et de douceur soyeuse, à tel point qu’on (Parker?) pourrait dire " prêt à boire ". Mais en pensant aux arômes tertiaires fabuleux que va prendre cette bouteille au vieillissement, ce serait quand même dommage...
Le Mazy est plus puissant (viril) mais possède aussi cette merveilleuse finesse et ce soyeux.
Là encore, le boisé ne se sent absolument pas.

En conclusion, les vins que Bernard Dugat nous a présenté sont pour moi un modèle de ce que la Bourgogne peut (doit) faire de mieux : des vins d’une finesse de tanins inégalable associée à une concentration et une complexité extraordinaires.
Je n’ose rêver à ce que peut donner son Chambertin d’un grand millésime à maturité...